Vers un retour au calme en Nouvelle-Calédonie après plusieurs journées de violences ?
Le Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, qui représente Paris sur l'archipel, a évoqué dans un communiqué une "situation plus calme et apaisée" après plusieurs nuits de violences sur l'archipel, indique 'BFM TV'.
La mise en place de l'état d'urgence et l'envoi de renforts policiers et militaires par Paris a en effet permis de stabiliser la situation, après quatre nuits consécutives de contestation.
Cependant, le représentant de l'État a reconnu, dans un communiqué cité par 'France 24', que le contrôle sur certains quartiers n'était "plus assuré", espérant pouvoir les "reconquérir" grâce à de nouveaux renforts.
Les restrictions en vigueur sur place restent maintenues, à savoir les interdictions de rassemblement, de transport d'armes et de vente d'alcool, ainsi que le couvre-feu de 18 heures à 6 heures du matin.
Au total, cinq personnes ont trouvé la mort depuis le début des événements en Nouvelle-Calédonie : deux gendarmes, deux hommes de 20 et 36 ans, ainsi qu'une adolescente de 17 ans.
Par ailleurs, le gouvernement a banni provisoirement TikTok sur l'archipel. Le réseau social chinois est accusé par Paris de propager de la désinformation anti-française et de pousser la population à l'insurrection.
« Magasins détruits, maisons incendiées, tirs avec des armes de gros calibres » : voici la description que donnait ’20 Minutes’ des événements qui secouent la Nouvelle-Calédonie depuis la nuit du 13 mai.
« Nous avons été confrontés depuis plus de 24 heures à un vrai déchaînement de haine, un déferlement de jeunes souvent alcoolisés, manifestement manipulés et d’une violence assez inouïe », dénonçait après la première nuit d'émeutes le général Nicolas Matthéos, commandant de la gendarmerie de Nouvelle-Calédonie, cité par le ‘Huffington Post’.
La Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie a chiffré à 200 millions d'euros le coût au 17 mai 2024 des dégâts causés par les émeutes, indique 'France 24'.
Entre 80 et 90 % du circuit de distribution (magasins, entrepôts, grossistes) de Nouméa auraient été détruits, ce qui provoque des pénuries alimentaires sur place.
Pour rappel, la Nouvelle-Calédonie relève de la souveraineté française depuis 1853, date de sa colonisation. En 1946, elle devient un territoire d'outre-mer français, bénéficiant ainsi d'une autonomie partielle.
Comme l’a rappelé ‘Le Monde’, de tels affrontements avaient déjà eu lieu en 1984, alors que le « caillou » était en proie à un climat de guerre civile. Mais cette fois, les opposants sont beaucoup plus présents dans la capitale, Nouméa.
Quelles sont les raisons d’une telle colère dans une partie de la population calédonienne ? C’est un projet de réforme constitutionnelle du territoire qui a indigné l’opposition indépendantiste et mis le feu aux poudres.
Pour comprendre la situation, il faut revenir aux accords de Nouméa signés en 1998, qui prévoient l’existence de trois corps électoraux différents en Nouvelle-Calédonie.
Le premier permet de voter aux élections municipales et nationales, le deuxième ouvre le droit de vote pour élire le Congrès calédonien, tandis que le dernier, particulièrement restrictif, permet aussi de se prononcer sur une éventuelle indépendance de la Nouvelle-Calédonie.
Or, la réforme actuellement débattue propose de « dégeler » le corps électoral. Elle risquerait, selon ses opposants, de marginaliser la population « kanak » historique au profit des « Caldoches », les habitants originaires d’Europe.
« Le peuple originel a été rendu minoritaire par une politique de peuplement qui n’avait pas d’autre but, justement, que de nous rendre minoritaires. Ouvrir le corps électoral, c’est faire perdurer cette injustice », a déclaré le porte-parole du Parti de libération kanak, Jean-Pierre Djaïwé, au Congrès calédonien.
Le texte en discussion à l’assemblée calédonienne prévoit d’ouvrir le vote pour les élections provinciales et au Congrès aux personnes résidant en Nouvelle-Calédonie depuis plus de dix ans.
La gauche, les macronistes et la droite s’entendent sur la nécessité de dégeler le système qui empêche aujourd’hui un électeur calédonien sur cinq de voter. En effet, les listes actuelles se limitent pour l’essentiel aux électeurs inscrits avant 1998 et à leurs descendants.
Lors de la séance de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, ce mardi 14 mai, le Premier ministre français, Gabriel Attal, a refusé de suspendre l’examen de la réforme.
Le président de la République, Emmanuel Macron, a proposé une visioconférence aux élus calédoniens. La rencontre n'a pas eu lieu jeudi 16 mai, les "différents acteurs ne souhaitant pas dialoguer les uns avec les autres pour le moment", comme l'a indiqué l'Élysée, cité par 'France 24'.
En attendant, les autorités parent au plus urgent en assurant un pont aérien pour ravitailler l'archipel en produits de première nécessité. L'aéroport reste fermé aux vols commerciaux.
Les autorités ont réitéré leur appel au calme, alors que la situation n’était toujours pas entièrement stabilisée sur place. Une solution pacifique et négociée pourra-t-elle être trouvée aux conflits qui déchirent la Nouvelle-Calédonie ?