Connaissez-vous Gulnora Karimova, la sulfureuse fille de l’ancien dictateur ouzbek Islam Karimov ?
Connaissez-vous Gulnora Karimova ? Née en 1972, la fille aînée de l’ancien dictateur ouzbèke Islam Karimov a connu une chute aussi vertigineuse que son ascension fut spectaculaire, entre politique et affaires, mode et showbizness. On vous raconte tout de la vie d’une femme sulfureuse qui n’a pas fini de faire parler d’elle.
Tandis que son père prenait le pouvoir en Ouzbékistan en 1991 pour ne le céder qu’à sa mort en 2016, Gulnora Karimova a étudié le design et les sciences politiques aux États-Unis dans les années 1990. L’occasion de créer des liens rapprochés avec le monde anglo-saxon.
Profitant de son lien de parenté direct avec le chef de l’État ouzbèke, Karimova a accumulé une fortune de plus d’un milliard d’euros grâce aux privatisations qui ont suivi la chute de l’URSS. Il est apparu que l’essentiel provenait de détournements de fonds publics et de pots-de-vin.
La jeune femme a d’abord mené une carrière de diplomate : elle a travaillé à la représentation de l’Ouzbékistan à l’ONU de 1998 à 2000 puis à l’ambassade de son pays à Moscou entre 2003 et 2005. En 2008, elle a été nommée vice-ministre des Affaires étrangères, chargée des questions de coopération internationale et humanitaire.
C’est grâce à l’immunité diplomatique offerte par ses fonctions que Gulnora Karimova a pu échapper à la justice américaine qui l’avait poursuivie pour « enlèvement d’enfants » à la suite de son divorce en 2001.
Mais l’ambitieuse politique a aussi été une femme d’affaires à succès ! Karimova a notamment lancé sa propre ligne de bijoux, qu’elle a appelée « Guli ».
La fille d’Islam Karimov a par ailleurs multiplié les investissements dans des secteurs aussi variés que les hydrocarbures, les télécommunications, le coton, les hôtels ou l’immobilier. Présidente du syndicat patronal d’Ouzbékistan, elle a été considérée pendant un temps comme la vraie patronne de l’économie du pays.
Mais Gulnora Karimova a aussi mené une véritable vie de jet-setteuse tout en vivant dans un palais. Prenant le nom de scène de GooGoosha, elle est devenue une chanteuse très populaire dans son pays grâce à la chanson « Unutma Meni ».
Et aussi fou que cela puisse paraître, GooGoosha a chanté en duo avec Gérard Depardieu, l’acteur français naturalisé russe en 2013, la chanson « Nebo moltchit » (« Le ciel se tait » en russe). Une collaboration improbable !
En 2009, Gulnora Karimova a racheté le duplex parisien du présentateur de télévision Arthur pour 30 millions d’euros. La femme d’affaires possédait d’autres biens en France, comme le château de Groussay à Montfort-l’Amaury, dans l’ouest de Paris.
Mais l’existence idyllique que menait Karimova s’interrompt brutalement en 2014. Alors que son père est en fin de règne, sa fille disparaît subitement. Elle ne refait surface qu’en 2017, après le décès d’Islam Karimov.
Que s’est-il passé ? Accusée de fraudes, Gulnora Karimova était en réalité incarcérée, comme l’a indiqué le bureau du procureur général d’Ouzbékistan. En 2017, elle a été condamnée à dix ans de prison pour fraude et blanchiment d’argent.
Selon la déclaration du parquet ouzbèke, Karimova était à la tête d’une organisation criminelle qui contrôlait plus de 1,3 milliards de dollars d’actifs répartis dans 12 pays, comme des propriétés à Londres ou des hôtels à Dubaï. Elle aurait reçu près d’un milliard de dollars de pots-de-vin sur des comptes offshore.
Mais sa peine a été commuée en assignation à résidence en 2018. Pourtant, elle a été renvoyée en prison dès l’année suivante pour avoir supposément violé les conditions de son assignation.
Un temps parmi les personnalités les plus puissantes de son pays et pressentie pour succéder à son père, Karimova est finalement tombée en disgrâce dans les cercles de pouvoir ouzbèkes. Une chute vertigineuse compte tenu de ses succès passés !
Gulnora Karimova détenait des sommes considérables dans des comptes en Suisse, dont une partie a été confisquée par les autorités du pays. Selon le ministère public suisse cité par ‘Le Temps’, une « galaxie opaque fonctionnait comme une "bande organisée" ayant pour but d’alimenter le train de vie luxueux de Gulnora Karimova. »
La faillite de la holding suisse détenant les actifs de Karimova en Ouzbékistan a été la deuxième la plus importante de l’histoire du pays après celle de ‘Swissair’, avec une dette totale de 5,6 milliards de francs suisses dus à des centaines de sociétés européennes.
En mars 2020, Gulnora Karimova a été condamnée à une peine supplémentaire de 13 ans d’emprisonnement pour extorsion, blanchiment d'argent et d'autres chefs d’accusation. Le temps est loin où celle qui est derrière les barreaux pour de longues années semblait régner sur l’Ouzbékistan.