Ces phrases assassines qui ont été lancées en direct par des politiques
La présidentielle approche, les candidats fourbissent leurs armes et le public se demande déjà quelles phrases assassines seront lancées pour déstabiliser ou décrédibiliser ses adversaires. Dans un pays où les petites phrases comptent parfois plus que les longs discours, les piques lancées à la télévision ont souvent contribué à bâtir ou à détruire la réputation d’un politique. Un best-of en images !
En 1974, le second tour de l’élection présidentielle oppose Valéry Giscard à d’Estaing à François Mitterrand. Pour la première fois, un débat d’entre-deux-tours est organisé entre les candidats et diffusé à la télévision. La phrase « Vous n’avez pas le monopole du cœur » lancée par Giscard à Mitterrand reste dans les annales et contribue à sa victoire finale.
Mitterrand prendra sa revanche sept ans plus tard contre un Giscard candidat à sa réélection et qui doit défendre son bilan. Le futur président socialiste s’amusera à appeler « l’homme du passif » son adversaire qui l’avait appelé « l’homme du passé » sept ans plus tôt.
Il faut dire que Mitterrand avait préparé le terrain dès l’annonce de candidature de Valéry Giscard d’Estaing. Avec une ironie mordante, il avait lancé publiquement : « Au lieu de présenter sa candidature aux Français, il aurait mieux fait de leur présenter ses excuses. »
En 1985, un débat télévisé opposé Laurent Fabius, Premier ministre de Mitterrand, à Jacques Chirac, le leader de la droite. Fabius apparaît en difficulté lorsque Chirac lui assène le coup de grâce en le comparant à un « roquet » qui s’agite.
Cette pique ne portera pas chance à Chirac. Opposé trois ans plus tard à François Mitterrand lors du débat d’entre-deux-tours, celui qui est devenu Premier ministre fait part de son vœu que les deux candidats s’appellent par leurs noms de famille. Réponse immédiate de Mitterrand : « Vous avez tout à fait raison, Monsieur le Premier ministre. » Inutile de préciser que Chirac a bu la tasse au second tour.
Face à la montée du FN, Bernard Tapie apparaît comme le recours idéal de la gauche pour croiser le fer avec Jean-Marie Le Pen. Lors d’un mémorable débat télévisé de 1989, Tapie lance au leader d’extrême-droite : « C'est pas parce que vous êtes une grande gueule que ce que vous dites est vrai ! » Les deux hommes en viendront quasiment aux mains.
Durant la campagne présidentielle de 2002, un débat télévisé oppose Dominique Strauss-Kahn à Nicolas Sarkozy, qui soutiennent respectivement Lionel Jospin et Jacques Chirac. Le débat s’envenime sur les charges sociales et Sarkozy lance à Strauss-Kahn, économiste de formation : « Pardon, on n'est pas à l’université… merci monsieur le professeur ! » Réponse de DSK : « Si vous étiez mon élève, vous n’auriez pas fait cette erreur. »
En 2004, le président Chirac s’agace de l’ombre que commence à lui faire le même Nicolas Sarkozy, devenu son ministre. Durant la traditionnelle allocution télévisée du 14 juillet, le chef de l’État se décide à rappeler qui est le chef d’un simple : « Je décide et il exécute. »
À l’occasion des élections européennes de 2009, un débat télévisé particulièrement houleux oppose François Bayrou à Daniel Cohn-Bendit. Ce dernier s’énerve des allusions de Bayrou à son passé et lui lance une répartie violente qu’il conclut par : « Ce genre de jeu, devant les citoyens, eh bien mon pote, je te dis, jamais tu seras président de la République, parce que t'es trop minable. »
Durant le débat d’entre-deux-tours de 2012, François Hollande embête Nicolas Sarkozy avec ses démêlés judiciaires. Le président sortant tente de contre-attaquer en lançant à Hollande : « Vous êtes un petit calomniateur. » Mais Hollande lui réplique immédiatement : « Ne ramenez pas la France à votre personne ».
Lors d’un débat télévisé rassemblant tous les candidats à l’élection présidentielle de 2017, Philippe Poutou attaque François Fillon sur les affaires dans lesquelles il est impliqué. Visiblement agacé, Fillon rétorque : « Je vais vous f****e un procès. »
Mais Poutou ne manquera pas de rappeler en direct qu’il est issu du monde du travail, contrairement à la plupart des hommes politiques : « À part Nathalie Arthaud, je suis le seul à avoir un travail normal sur ce plateau. »
Bien que retiré de la vie politique, l’ancien président François Hollande a gardé le goût des petites phrases assassines. À propos de Michel Barnier, alors candidat à la primaire de la droite, il se permet rien moins que : « Michel Barnier a un côté prince charmant pour les maisons de retraite. »
Les clashes à la télévision n’opposent pas toujours les politiques entre eux, mais parfois aussi les politiques aux journalistes. Dans les années 1970, les passes d’armes entre le leader communiste Georges Marchais et Jean-Pierre Elkabbach étaient fréquents. Si le légendaire « Taisez-vous Elkabbach » n’a jamais été prononcé, le public de l’époque a tout de même pu entendre « Vous n’êtes pas payé au nombre de questions que vous posez. » ou « Moi aussi j’ai un cerveau. »
Volonté de revanche quarante après ? En 2015, à l’antenne d’Europe 1, Elkabbach lance à la ministre de la Culture Fleur Pellerin, qui avait admis ne pas avoir lu le récent Prix Nobel français de littérature, un cinglant : « Il paraît que maintenant vous lisez. »
Candidat à la primaire des Républicains, Xavier Bertrand vante ses chances de battre Emmanuel Macron au second tour. La journaliste Anne-Sophie Lapix le ramène brutalement sur terre : « Enfin pour l’instant, vous n’êtes même pas au second tour… »
Les Français n’ont évidemment pas le monopole de la punchline et les Américains savent aussi s’en donner à cœur joie. Opposé au candidat républicain Mitt Romney dans un débat pour sa réélection en 2012, Barack Obama se moque ouvertement de son adversaire à propos de l’équipement de l’armée : « Vous avez mentionné la Navy et le nombre inférieur de navires par rapport à 1916. Eh bien, gouverneur, nous avons également moins de chevaux et de baïonnettes parce que notre armée a changé. »