Condamné pour corruption fin 2022, Bernard Laporte a été nommé Directeur du rugby club de Montpellier
Condamné il y a un an pour corruption, Bernard Laporte s'était retiré de ses fonctions dirigeantes dans le monde du rugby. Il a fait appel et sa peine est suspendue pour le moment.
Et pourtant, l'ancien sélectionneur du XV de France vient d'être nommé Directeur du club de rugby de Montpellier.
Lanterne rouge du top 14, le club de l'Hérault est actuellement dans une situation d'urgence sportive.
Le problème ? Il a été choisi pour occuper ce poste par Mohed Altrad, le président du club (à droite sur la photo), avec lequel il a été condamné pour avoir noué un "pacte de corruption".
"Aujourd’hui, nous avons décidé d’aller chercher l’un des meilleurs connaisseurs français du rugby mondial", a assuré Altrad dans les colonnes du 'Journal du dimanche'. Pour lui, Bernard Laporte incarne "la culture de la gagne, le leadership, l’esprit d’équipe".
Sans surprise, cette nomination a fait beaucoup de mécontents parmi les supporters du MHR et dans le monde du ballon ovale, comme l'a relevé 'La Dépêche'.
Sur 'RMC Sport', Bernard Laporte a rappelé la présomption d'innocence et la légalité de sa nomination, déclarant que seuls les "jaloux" et les "aigris" s'opposaient à son retour aux responsabilités dans le monde du rugby.
On ne présente plus Bernard Laporte : sélectionneur du XV de France, ministre des Sports, président de la Fédération française de rugby (FFR)… son CV est long comme le bras !
Bernard Laporte avait commencé sa carrière comme rugbyman professionnel. À 20 ans, il est victime d’un grave accident de la route après s’être endormi au volant. Son médecin déclare alors qu’il n’est plus question pour lui de pratiquer le rugby.
Mais le jeune joueur en décide autrement : champion de France juniors avec Gaillac en 1983, il rejoint Bègles-Bordeaux où il remporte le championnat en 1991.
C’est dans ce club qu’il rejoint la première ligne dite des « Rapetou », en référence aux gangsters de Disney, composée de Vincent Moscato (au centre sur la photo), Serge Simon et Philippe Gimbert.
Formé comme entraîneur, Bernard Laporte reprend le Stade français en 1995 avec un joli palmarès à la clé : champion de 3e division en 1996, il monte chaque année d’un échelon et remporte le championnat de France en 1998, puis la Coupe de France l’année suivante.
Les performances du jeune entraîneur ne passent pas inaperçues et lui permettent de succéder à Jean-Claude Skrela à l’issue de la Coupe du monde 1999, dont le XV de France a terminé finaliste.
Premier sélectionneur de l’équipe de France à n’avoir jamais porté son maillot, Bernard Laporte mène la sélection vers quatre victoires au Tournoi des Six nations (2002, 2004, 2006 et 2007), dont deux Grands Chelems (2002 et 2004).
Sous son impulsion, la France termine par ailleurs deux fois à la quatrième place de la Coupe du monde de rugby, en 2003 et en 2007.
Le XV de France est réputé pour avoir renforcé son assise défensive sous le règne de Bernard Laporte. Cependant, certains connaisseurs du ballon ovale ont regretté la disparition du « french flair », cette spontanéité française qui permettait de marquer des essais inattendus.
Soutien de Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle de 2007, Bernard Laporte est nommé Secrétaire d’État aux Sports aussitôt après avoir quitté la sélection tricolore fin 2007.
Un texte marquant de son passage au ministère est la « loi dopage » qui crée une infraction pénale de détention de produits dans le but d’affaiblir les filières de distribution.
Bernard Laporte a aussi initié une réforme du sport de haut niveau. Mais son poids politique est faible au sein du gouvernement, qu’il quitte lors du remaniement ministériel de 2009.
L’homme de rugby revient alors dans son univers de prédilection en occupant des postes dirigeants à l’Aviron bayonnais puis au Stade français.
En 2011, Bernard Laporte reprend avec succès le banc du RC Toulon, avec lequel il remporte le Top 14 en 2014 et surtout le championnat d’Europe trois saisons consécutives.
En 2016, l’ancien ministre est élu président de la Fédération française de rugby, à l’issue d’une campagne durant laquelle lui et ses soutiens ont fait le tour de France des clubs pour défendre leur programme.
Renonçant au projet de grand stade national, Bernard Laporte lance plusieurs réformes du rugby français, comme le décalage des matchs de Top 14 afin de favoriser la présence du public dans les rencontres amateur, ou la fin de la présence de joueurs naturalisés en équipe nationale pour ne plus défavoriser de petites sélections comme les Fidji ou la Géorgie.
Son grand succès à la tête de la FFR a incontestablement été l’attribution à la France de la Coupe du monde 2023 : alors que le pays ne partait pas favori, il a finalement été désigné pour l’organiser fin 2017.
À la même époque, le dirigeant est fragilisé par une affaire de favoritisme présumé au profit du groupe Altrad, notamment concernant l’octroi du sponsoring du maillot du XV de France. Une saga judiciaire de plusieurs années qui a abouti à une condamnation en 2022.
Reconnu coupable de corruption et de trafic d’influence au bénéfice du groupe Altrad, Laporte a été condamné à deux ans de prison avec sursis, 75 000 euros d’amende et une interdiction d’exercer toute fonction dans le monde du rugby pendant deux ans.
En attendant le verdict en appel dans l’affaire qui avait précipité sa chute, Bernard Laporte a quitté ses fonctions à la FFR pendant l’hiver 2023.
Son arrivée au MHR marque-t-elle un nouveau départ ? Laporte sera-t-il rattrapé par son procès en appel qui doit s'ouvrir courant 2024 ? Une chose est sûre : le personnage fera de nouveau parler de lui dans les prochains mois.